Tout comme les autres pays d’Afrique Australe, la Zambie a connu un niveau de précipitations exceptionnellement bas pendant la saison des pluies de 1991-1992. Les pluies avaient bien commencé dans de nombreuses régions du pays en octobre, mais se sont arrêtées en janvier – mois clé pour la culture du maïs, principale céréale du pays. La moitié sud du pays fut la partie la plus touchée, y compris les régions des provinces méridionales et orientales, où les récoltes de maïs sont habituellement excédentaires. Par conséquent, la sécheresse a eu une incidence particulièrement grave sur la production nationale céréalière qui, l’année suivante, ne s’est élevée qu’à 40% de la moyenne des trois années précédentes. Pour l’année 1992-1993, il a fallu importer (aide commerciale et alimentaire) environ un million de tonnes de céréales au total.

 

La sécheresse est survenue à un moment particulièrement difficile pour le pays, tant sur le plan économique que politique. La chute des prix du cuivre, la principale exportation du pays, ainsi qu’une mauvaise gestion économique ont plongé l’économie zambienne dans une période récession qui s’étendit sur plus d’une décennie. L’une des politiques clés mise en oeuvre par le gouvernement du “United Independence Party” (UNIP ou Parti uni pour l’indépendance) dans le secteur agricole consista à fixer le prix du maïs à l’échelon national et à fournir des subventions sur les engrais, encourageant ainsi la culture du maïs hybride dans les zones éloignées des marchés et dans celles étant moins adaptées, sur le plan écologique, à sa culture. Parallèlement, le prix de la farine de maïs était alors maintenu assez bas dans l’intérêt de la population urbaine (42% de la population vit en milieu urbain), d’où des subventions massives en faveur du secteur  alimentaire, qui n’ont pu, en fin de compte, être soutenues. Les ressources mises à la disposition de la fonction publique s’étaient amenuisées et, sans hausse de productivité, son efficacité avait, elle aussi, diminué. Le poids de la dette accumulée par le pays était alors l’une des plus élevées de la région, par tête d’habitant. La misère chronique qui sévissait en milieu rural se reflétait dans les taux élevés de malnutrition infantile, bien supérieurs à ceux de la plupart des autres pays de la région.

 

Lors des premières élections pluripartites d’octobre 1991, le “Movement for Multiparty Democracy” (MMD ou Mouvement pour la démocratie pluripartite) remporta une victoire écrasante et se lança dans un programme de réformes d’une portée considérable, comprenant notamment un Programme d’Ajustement Structurel (PAS) et une réforme de la fonction publique. A court terme, ces réformes menacèrent d’accroître la pauvreté et de réduire davantage le rendement de la machine administrative gouvernementale.

 

Le nouveau gouvernement reconnut tout de suite la gravité de la situation. Le 12 février 1992, le Président Chiluba déclarait les provinces méridionales, occidentales et orientales zones sinistrées et, deux semaines plus tard, étendait sa déclaration à l’échelon national, la Zambie devenant par là même le premier pays de la région à faire une déclaration nationale. Un groupe de travail chargé de l’aide d’urgence en période de sécheresse, coordonné par le Ministère de l’agriculture, créa des sous-comités interministériels afin de mettre au point les volets d’une réponse globale à la crise. Il fut décidé qu’une “National Bulk Import Control Agency” (NBICA ou Agence nationale de contrôle des importations en grandes quantités), récemment créée, introduirait la majeure partie des importations céréalières directement dans le système de commercialisation, par le biais de la Fédération des coopératives de Zambie (“Zambia Cooperative Federation” ou ZCF), ancien organisme parapublic disposant d’un vaste réseau d’entrepôts et de personnel dans tout le pays.

 

Lors de la prise de décision sur la façon de gérer le volet du programme portant sur la distribution de l’aide d’urgence, le gouvernement dut prendre de difficiles décisions quant à son degré de dépendance du système administratif hérité du  régime précédent. En réponse à des problèmes de sécurité alimentaire, plus localisés, la performance du système administratif avait été médiocre. Par exemple, bien qu’il fût loin d’avoir l’ampleur de l’opération de 1992-1993, le programme d’aide d’urgence mis en oeuvre en 1987 s’était avéré inefficace, aux dires de la plupart des gens. Le maïs était alors passé par l’administration locale et les structures de l’UNIP. Le favoritisme s’était généralisé et les plus nécessiteux n’avaient, en grande majorité, reçu aucune aide (PPM, 1993b). La réforme de la fonction publique avait à peine commencé et son aptitude à gérer efficacement une vaste opération d’aide d’urgence était sujette à caution.

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