Issue 16 - Article 1

Échange Humanitaire No.16 la politique de l'action humanitaire, les économies de guerre, les réformes structurelles et les défis politiques pour la Commission européenne (CE), les catastrophes naturelles et la question des partenariats sur le terrain

juillet 1, 2000
ODI
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Ce bulletin, extrêmement dense, contient des articles groupés autour de plusieurs thèmes. On citera la politique de l’action humanitaire, les économies de guerre, les réformes structurelles et les défis politiques pour la Commission européenne (CE), les catastrophes naturelles et la question des partenariats sur le terrain des opérations.

 

L’an passé , nous avons concentré  notre attention sur la crise du Kosovo, dans le bulletin N° 15, et nous avons aussi ajouté  un rapport plus long intitul頓 Le maintien de la paix par Protectorat : défis opérationnels et politiques au Kosovo”  sur notre site Internet. Les conflits lors de la dissolution de l’ ex- Fédération yougoslave ne sont en aucune sorte terminés. Le statut final du Kosovo reste indécis et la pression internationale sur le régime de Milosevic continue. Les enjeux politiques sont élevés et, comme l’ explique l’ article sur l’ aide internationale et la politique énergétique vis-à -vis de la Serbie, dans ces conditions l’ aide devient hautement politisée.

 

Notre deuxième grand thème porte sur les économies de guerre, avec des exemples particuliers sur l’ Angola et la Sierra Leone. Comme le montrent aussi certains comptes rendus d’ouvrages, cela pose la question de savoir qui alimente le conflit et la réponse n’est absolument pas que l’ aide joue un rôle majeur. Le contrôle de ressources naturelles précieuses telles que le pétrole et les diamants dans ces deux pays est un objectif majeur dans les stratégies des parties en guerre et dans la dynamique des conflits. Ces ressources doivent être extraites et vendues sur le marché mondial. C’est là que les corporations transnationales interviennent ainsi que les “ armées privées” . Les sommes d’argent engagées dépassent largement le montant de l’aide distribuée. Bien que les guerres altèrent évidemment la nature et la structure de l’économie “ officielle” , le plus grand défi pourrait venir des  intervenant n’appartenant pas à l’Etat car ceux-ci sont les plus difficiles à cerner et à restreindre. De plus, ils se situent en dehors des lois humanitaires internationales.

 

Même les sanctions commerciales, sur lesquelles nous avons donné du matériel de référence sur notre site Internet et dans le dossier thématique N° 31, stimulent la contrebande et souvent donnent un plus grand rôle au crime organisé. C’est visible en Serbie. Toutefois, nous pouvons pas assumer que “l’économie de protectorat”  au Kosovo n’est pas totalement “ légale” non plus. Nous travaillons actuellement sur la traduction en français d’un dossier thématique appelé “ La politique économique de guerre : ce que les organisations humanitaires doivent savoir” . Notez également la bibliographie explicative sur les économies de guerre, à  votre disposition sur.

 

Tout cela constitue un grand défi pour les organisations humanitaires et les donateurs, ainsi que pour les politiques de gestion des conflits des gouvernements étrangers. Pour l’UE, les réformes récentes ont posé  la question des rapports entre l’ aide humanitaire et l’ aide au développement. Le débat porte surtout sur la “ stratégie de sortie”  de l’ECHO. Toutefois, il serait préférable de parler de “ stratégie d’entrée”  pour les instruments du développement, comme le montre la documentation sur les expériences de l’UE dans trois pays africains. Bien que les Etats membres hésitent à abandonner leur autonomie en ce domaine, la pression continue pour mettre en place une politique commune à  toute l’Union européenne en matière d’affaires étrangères et de sécurité. L’aide et en particulier l’ aide humanitaire, sera-t-elle subsumée sous cette politique comme un instrument politique de plus ou gardera-t-elle sa neutralité et son impartialité politiques ? On parle beaucoup de “ cohérence”,  c’est à dire l’alignement et l’utilisation de différents instruments de politique étrangère pour atteindre le même objectif. La cohérence conduira-t-elle à  la politisation de l’ aide humanitaire ?

 

Le Canada semble avoir trouvé une bonne approche avec sa “ politique humaine de sécurité” .  Ce pays a la réputation d’être un donateur sans forts interêts domestiques dans ces relations extérieures. Il a joué un rôle de premier plan dans de nombreuses initiatives : ré solution de conflits, maintien de la paix, interdiction des mines, sanctions plus humaines, etc. Pourtant, la cohérence reste là encore difficile à réaliser au sein du corps politique canadien. Récemment, il y a eu dans la presse canadienne des polémiques sur certaines des actions du Canada qui semblent en contradiction avec, au moins, l’ esprit d’ une politique humaine de sécurité . Le budget canadien de l’aide a aussi baissé  rapidement et un débat sérieux s’est engagé  sur la question de savoir si ses forces armées devraient s’intégrer davantage aux structures militaires des Etats-Unis, ce qui compromettrait son image dans les opérations de maintien de la paix. Plus grave encore, on a derniè rement appris qu’une organisation humanitaire réputée avait sciemment accepté  du personnel choisi par les autorités canadiennes pour mener ce qu’il convient d’ appeler des activités de “ renseignement”  en Serbie.

 

Bien que dans un contexte très différent, cette même question de cohérence et d’économies de guerre s’est posée à  l’égard des relations entre les organisations humanitaires et les acteurs non gouvernementaux dans le conflit au Sud-Soudan. Le Mouvement de Libération du Peuple Soudanais a demandé  aux ONG de signer un Protocole d’ Accord ou de partir. Environ 25% sont parties. Certains des arguments pour ou contre la signature sont présentés dans ce bulletin.

 

Nous publions aussi diverses contributions sur des catastrophes naturelles en mettant l’accent tout particuliè rement sur le rôle de la gestion de l’information et la transparence. A l’ avenir, nous espérons pouvoir publier davantage les leçons à retenir sur la réponse internationale au cyclone Mitch qui a dévasté  l’Amérique centrale fin 1998. Les évaluations que nous avons vues jusqu’à présent indiquent que beaucoup de ces enseignements pourraient s’intégreraux stratégies et programmes après les inondations au Mozambique. Cependant il n’est pas certain que le système humanitaire international soit déjà en mesure d’ apprendre ces leçons.

 

Peut-être plus qu’en Afrique ou dans le Caucase, l’Amérique latine et l’Asie doivent faire l’objet de réactions aux catastrophes associant les nombreuses organisations bien établies, qu’elles soient gouvernementales (locales), non gouvernementales ou communautaires. “ Partenariat”  est le mot à  la mode en ce moment mais les situations de crise révèlent les tensions inhérentes qui ont tendance à exister entre des partenaires de puissance inégale et avec des groupes d’interêt trés différents différentes. C’est un thème que nous ne faisons qu’ aborder ici et sur lequel nous voudrions avoir plus de contributions.

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