En raison des formes actuelles des violents conflits dans le monde, plus de 90 % de l’ensemble des victimes sont des civils et l’exercice de la terreur sur des populations entières est un moyen de garder une emprise sociale sur elles. Les victimes doivent également endurer la destruction délibérée de leurs environnements économiques, sociaux et culturels. La manière d’interpréter ces événements est essentielle pour comprendre la façon dont les populations touchées par la guerre les vivent et les décrivent, et comment elles font alors face à ces situations et se procurent de l’aide. Ces situations sont complexes et évolutives et les résultats dépendent des forces sociales, culturelles et politiques existantes.

 

L’importance accordée aux projets psychosociaux s’inspirant des modèles de traumatisme occidentaux s’est fort accrue ces dernières années et ce rapport présente une analyse critique de ces activités en prenant pour exemples la Bosnie et le Rwanda. La détresse et la souffrance inhérente à la guerre sont susceptibles d’être redéfinies comme étant un état psychologique – une “traumatisation”- pour lequel une attention et un traitement professionnels sont nécessaires. Pour la grande majorité des personnes affectées, la “traumatisation” est une pseudo-condition. Une telle démarche plutôt étroite risque donc de placer certaines personnes dans le rôle de malade et de négliger l’intégration des choix, traditions et compétences des populations affectées dans les stratégies de survie novatrices. Cette démarche exagère également le rôle des experts occidentaux et de leur technologie en matière de santé mentale, qui est censé convenir à toutes situations.

 

Outre une base solide de connaissances concernant les caractéristiques des conflits contemporains, le personnel international pour l’aide d’urgence doit être aussi informé que possible de l’ampleur sociale, culturelle et historique de l’impact de ces conflits sur le site pour lequel un projet a spécifiquement été assigné. Une condition fondamentale à la réussite des interventions repose sur la qualité des relations édifiées avec ceux que nous désirons aider. En partant de ce principe, on peut envisager des projets qui tiendraient compte des priorités des personnes directement concernées, ne mettraient pas en question leurs propres contextes et interprétations culturels et, espérons-le, seraient aussi capables de faire face à l’évolution des circonstances et des choix.

 

Le souci dominant concerne le rôle d’un milieu social qui, bien qu’immanquablement ciblé en période de conflit, tient compte du fait que les populations de survivants sont à même de prendre en charge leurs souffrances, de s’adapter et de se rétablir. L’action doit donc se concentrer sur la collectivité et non sur l’individu. Le terme “psycho” des activités psychosociales prête à confusion et devrait être éliminé. On devrait se concentrer sur les principes de développement/réhabilitation social auxquels peuvent venir s’ajouter les autres aspects rejetés par les calamités provoquées par l’homme plutôt que par la nature. Il s’agit donc, en particulier, d’adopter une approche globale qui ramène la question des droits et du désir de justice des victimes au centre des débats.

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