Ce dossier présente un cadre d’analyse et d’engagement de l’économie politique des conflits armés pour les opérations humanitaires. Centrée sur la manière dont la répartition des profits et des fardeaux d’une guerre est régie – son économie politique – cette approche constate que la perpétuation d’une guerre peut devenir un aboutissement logique de relations économiques et politiques nécessitant l’usage de la violence pour leur reproduction ; motivant en ce sens le pouvoir des « gagnants » et renforçant l’impuissance dont découle la vulnérabilité des « perdants ». Une situation de guerre offre et justifie en effet l’emploi de moyens violents permettant de réaliser ou de conserver bénéfices économiques et pouvoir politique qu’une situation de paix ne permettrait souvent pas. Il n’est donc pas forcément nécessaire de gagner une guerre pour en tirer profit, et en être « gagnant », alors que celle-ci représente pour les « perdants » une accumulation continue d’abus, de crainte et de frustration.

 

Dans ce dossier, nous suggérons qu’une compréhension de l’économie politique des conflits par les organisations humanitaires peut leur permettre de mieux analyser les formes de violence menaçant la sécurité des populations. Une telle compréhension est également indispensable pour identifier le contexte et les conséquences des activités humanitaires, notamment de façon à minimiser leur impact négatif – sachant que les belligérants et les Etats étrangers peuvent chercher à manipuler une présence humanitaire et à détourner ses ressources. Enfin, l’interprétation du déroulement d’un conflit en fonction de son économie politique permet de mieux cerner certains intérêts politiques et économiques faisant obstacle à un passage à la paix et d’éviter la reconstruction d’une économie d’avant-guerre qui peut avoir fortement contribué à l’origine du conflit.

 

Deux défis se présentent pour les organisations humanitaires : améliorer la répartition des pouvoirs et offrir une protection économique plus efficace en temps de guerre. Cela nécessite une grande diversité d’initiatives qui se trouve souvent limité par les mandats et capacités de ces organisations. Les organisations humanitaires ont toutefois une certaine marge de manoeuvre et les programmes peuvent être adaptés pour répondre aux stratégies locales de répartition des pertes et des gains, réduisant ainsi par exemple le degré de manipulation que les groupes armés exercent sur l’aide de secours et l’économie locale, ou inspirer et encourager une action politique collective fondée sur les droits et revendications des victimes.

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